Le Crapaud et le Nénuphar

Le crapaud et le nénuphar

 

 

Un crapaud tout guilleret après sa journée sous la terre

Vint se promener près d’un plan d’eau quand vint le soir

C’était là son habitude il admirait tant les fleurs ivoires

Elles riaient de cet admirateur transi sans jamais être amère

 

Sieur le Crapaud s’installait sur les grandes feuilles en surface

Il observait la nuit, sûr de trouver bientôt un ver ou une limace

Il se disait : « C’est le meilleur endroit ! », assis tel un empereur

Les nénuphars aimaient cet amphibien si laid mais au grand cœur

 

Il chantait afin d’attirer quelques crapaudes, quel que soit leur beauté

Hélas, malgré son répertoire, personne au grand jamais ne venait vers lui

A chaque fois, entre deux proies qu’il mangeait, il espérait son arrivée

Sans se lasser, assuré de son futur succès, il revenait ainsi chaque nuit

 

Les nénuphars éprouvaient du chagrin pour les efforts vains de leur ami

Aussi pour l’aider, ils se mirent à grandir sans fin de plus en plus

Ils étalaient leurs feuilles tel un tapis accueille une étoile au paradis

 Parés de leur géante verdure, ils espéraient la venue de la belle ingénue

 

Le gentil crapaud du début cependant s’endormait avec le temps

Fatigué de ses vocalises sans retour il pleurait le plus souvent

Plein d’espérance, il gonflait pourtant sa belle gorge d’opérette

Presque debout sur ses pattes, il se hissait haut tel un athlète

 

Ce qui devait advenir arriva, les années passaient au milieu des nénuphars

Sa triste solitude lui pesait mais il tissait avec eux une amitié sans fard

C’est par des cris de joie que chaque nuit ils applaudissaient leur star

Son chagrin faisait peine à voir mais il restait pour chanter jusque tard

 

 Un soir, monsieur Crapaud arriva un peu plus tôt qu’à la tombée du jour

C’était plus risqué pour lui, son allure pataude faisait de lui une proie plus facile

Assis sur sa feuille préférée, bien trop visible, il vit une femelle en mal d’amour

C’était l’occasion rêvée, il chanta, aussitôt ravie, elle s’éprit de son talent habile

 

C’est alors que Crapaud comprit : « Si j’avais osé, venir un peu plus tôt !

Jamais je n’aurai tant pleuré de ne voir venir la belle avec ses oripeaux ! »

Les nénuphars, témoins de ce récent bonheur, célébraient leur champion

Ils firent éclore des fleurs tout en couleur, si heureux de cette nouvelle union

 

Tant il est vrai que la simple routine nous tue sans un beau brin d’audace

Si les rites sont utiles au service de la vie jamais ils ne doivent enfermer

Rien n’est plus triste qu’une âme en peine dans la spirale du sur-place

Un pas de côté bien souvent peut nous emporter vers l’Amour étoilé...

 

....Entre crapauds et nénuphars...

 

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